Qui suis-je ?

Cette page est un extrait de l'article Bienvenue.



Faut-il se montrer pour exister, apparaître pour être ? Ou comme un goal, être solitaire dans le but, mais solidaire avec son équipe; ou encore, vivre caché pour être heureux.

Pierre Zaoui, professeur de philosophie (né en 1968) auteur de La discrétion, ou l'art de disparaître (2013), nous propose d'adopter une attitude mesurée : alterner présence et absence; être présent mais à bonne distance et nous dit que comme les grandes villes où l'on peut s'isoler, les nouvelles technologies sont aussi propices à la discrétion.
Grégoire Lacroix, journaliste et poète (né en 1933) : " Méfions-nous de la notoriété. Quand on est trop visible, on devient très visable. "- Les nouveaux euphorismes de Grégoire (2009).
Anaïs Nin (1903-1977) : " Notre culture a élevé au rang de vertu le fait de vivre comme des extravertis. Nous avons découragé le voyage intérieur, la quête d'un centre. Aussi avons-nous perdu notre centre, et il nous faut le retrouver. "
Susan Cain (née en 1968) : " Les introvertis se concentrent sur le sens qu’ils donnent aux événements qui les entourent pendant que les extravertis plongent au cœur de ces événements. Les introvertis rechargent leurs batteries dans la solitude ; c’est au contraire s’ils n’ont pas assez d’interactions sociales que les extravertis ont besoin de les recharger. " - La force des discrets (2012).
Guillaume Erner, journaliste et sociologue (né en 1968) auteur de La souveraineté du people (2016) déclarait sur un plateau de télévision : " Jadis la société était organisée sur la religion et donc les individus voulaient atteindre la sainteté. Maintenant la société regarde du côté des valeurs médiatiques et donc les gens pensent que la célébrité est la donnée la plus enviable qui soit..."
Maxime Le Forestier (né en 1949) : " Paraître ou ne pas être, la question fait débat... L’homme est un animal qui vit en compagnie ou en troupeau. Il ne lui est pas possible d’être seul. Mais qu’est-il prêt à sacrifier pour paraitre ? Pour moi la question s’est toujours posée comme ça : que suis-je prêt à montrer ? "

Paraître / Maxime Le Forestier, 2019

Paraître ou ne pas être, ouh la la, la question que voilà
Paraître ou ne pas être, la question fait débat


On invite à comparaître
Ceux qui veulent parler de ça
Et pour bien les reconnaître
On a mis une caméra
Ceux qui parlent pour paraître
Apparemment sont tous là
Ceux qui préfèrent ne pas être
Évidemment n'y sont pas


Paraître ou ne pas être, ouh la la, la question que voilà
Paraître ou ne pas être, la question ne se pose pas


Il faut dire que tous les êtres
Qui respirent ici-bas
Sont voués à disparaître
Sauf à croire à l'au-delà
Ce qui nous permettrait d'être
Sans forcément qu'on nous voie
Et quelquefois d'apparaître
Aux élus de notre choix


Paraître ou ne pas être, ouh la la, la question que voilà
Paraître ou ne pas être, la question n'est pas là


Si on se plaît à paraître
On fait des duplicata
Alors on finit par être
Une image et rien que ça
Si on veut seulement être
On n'existe que pour soi
On oublie la boîte à lettres
Des lettres on n'en reçoit pas


Paraître ou ne pas être, ouh la la, la question que voilà
Paraître ou ne pas être, prends la pose et tais-toi
Paraître ou ne pas être, la question n'est pas là
Paraître ou ne pas être, la question ne se pose pas


Bernard Harcourt, directeur d'études à l'EHESS et professeur de droit (né en 1963) / La Grande table idées par Olivia Gesbert - France Culture :

(Photo : Getty Images)

" Tout fonctionne par👍, par ♥️, par le plaisir. En nous séduisant, nous donnons toutes nos informations volontairement tout le temps."

" Notre autre numérique est comme un hologramme de nous même constitué par toutes les traces que nous avons laissés et qui créent un double qui est plus fiable que notre moi analogique. Nous pensons, imaginons ce que nous sommes. Notre moi numérique est composé de toutes les choses que nous lisons et regardons."
" Toute la nouvelle logique qui circule dans cette société d'exposition consiste à trouver la personne numérique la plus proche de la notre pour nous faire des propositions, pour savoir ce que nous voulons. Cette rationalité est entièrement ancrée dans les algorithmes. Ce n'est pas comme cela qu'on tentait de prédire les gens et leurs désirs auparavant."
" On donne nos données qui sont une mine d'or aux sociétés et au gouvernements. Nous sommes dans un système économique qui a radicalement changé. Cela représente la même chose que l'or ou le pétrole jadis. On peut les vendre, les connecter et ainsi tout savoir sur les personnes individuellement et en groupe."
" Il y a un fusionnement de la société, de l'économie et de la politique. On voit les grandes sociétés comme Facebook qui sont en train de faire de la politique sur le choix des contenus, sur ce qu'on peut dire ou non, sur de la propagande économique. On voit des gouvernements qui font du commerce en participant à la création de métadonnées. En somme, on voit les frontières se briser entièrement."
" La rationalité sécuritaire est précisément ce qui nous piège et nous enfonce dans ce monde où nous sommes de plus en plus transparents. Bien sûr il y a des nécessités et des bénéfices sécuritaires mais ce monde de plus en plus transparent aura des dérives et c'est là qu'il faut travailler. L'information recueillie l'est pour de bonnes raisons mais aussi pour nous transformer et nous surveiller de toutes les manières."

Pour vivre heureux, vivons caché.
Le Grillon, une fable de Jean-Pierre Claris de Florian.